Entretien Courrier des Afriques

avec Boubakar Traoré

« Mon souhait, prôner la formation pour tous et le libre-échange intégral »

Une entreprise signée Boubakar Traoré a vu le jour au Canada en 2009. Ivoirien, la cinquantaine et grand défenseur de la coopération Nord Sud, nous l’avons approché afin d’avoir sa vision socio-réformiste sur la nécessité de cette entreprise, son point de vue sur le rôle et la place de l’Afrique dans les échanges internationaux,… Président Fondateur d’Afro-Médiation Inc., serviteur inlassable des innovations en termes de développement, sur expérimenté et doté d’une extraordinaire intelligence, signataire de la charte de l’ONU depuis février 2014, Boubakar prône haut et fort que pour atteindre le possible il faut rêver l’impossible. Du planteur de Bonoua au cultivateur de Sikasso, du sculpteur de Ndendé au restaurateur de Saint louis, du tisserand de Tenkodogo au pécheur de Malabo, de Takoradi , de la Gaspésie ou de Mopti, l’artisan de la mondialisation pense que tous, nous aurons tort de nous priver de la formation et du libre-échange.

Sylvie Gauthier : En plus de vos préoccupations et missions de développement, vous venez d’adhérer au pacte mondial des Nations Unies, quelles en sont les raisons?

Boubakar Traoré : Les raisons sont clairement visibles à travers les missions et les objectifs des deux parties à savoir le pacte mondial des Nations Unies et Afro-Médiation Inc. Le pacte mondial des Nations Unies joue un rôle capital pour le développement de l’humanité. Afro-Médiation Inc. épouse cette philosophie et œuvre aussi pour le progrès du continent africain qui semble marginalisé, absent de tous les grands rendez-vous internationaux. On a comme l’impression que l’Afrique n’a pas son destin en mains et que son avenir est façonné par d’autres. Nous voulons contribuer à inverser cette tendance en investissant clairement dans le renforcement des capacités humaines. En adhérant au pacte mondial des Nations Unies, nous voulons donc apporter notre pierre à l’édification d’un modèle social intégrateur, à la construction d’un monde plus juste, plus ouvert où l’Afrique ne jouera plus au dindon de la farce.

Avez-vous le sentiment que l’Afrique dépend toujours de l’extérieur?

Vous n’avez qu’à vous rendre à Paris, à Montréal ou à New York. Vous vous rendrez compte que les produits Africains sont généralement commercialisés par des structures ou personnes qui n’ont aucune connaissance ni de ces aliments ni encore moins souvent du continent. Ce constat peut s’étendre aux autres secteurs d’activité relatifs à l’Afrique y compris jusqu’ aux prises de grandes décisions politiques du continent. On ne peut se développer lorsque tout nous est dicté de l’extérieur.

Pourriez-vous nous expliquer les objectifs premiers d’Afro-Médiation Inc., et vos véritables attentes du pacte mondial des Nations Unies?

Mon objectif premier est de donner à Afro-Médiation Inc., une large promotion s’appuyant sur une communication bien élaborée ainsi que la recherche et le développement de partenariats intelligents avec des pourvoyeurs d’opportunités, des créateurs de richesses du Nord comme du Sud. Nous travaillons au rapprochement des différentes organisations pour le bien être de l’humain au quotidien. C’est ce dernier point qui explique notre adhésion au pacte mondial des Nations Unies.

Dans notre monde actuel la réussite est souvent liée au réseautage dans la société occidentale et au coup de pouce dans certains cas. Pourriez-vous nous dire qui se cache derrière la réussite de toutes ses missions?

Rires. Autodidacte et pragmatique dans l’âme, je cherche toujours à comprendre ce qui se passe et surtout rechercher les causes et les raisons même s’il y a du chemin à faire entre une idée qui germe et sa réalisation. Pour ce qui est de votre conclusion, sachez chère madame que tous les princes ne naissent pas dans un château. Mon soutien repose sur le maitre de l’univers et ma motivation; des épreuves que je rencontre.

Pour moi, un projet, c’est un peu comme un rêve et la traduction peut être l’opposé de ce qu’on pense. Confiez-vous à dix personnes et vous aurez dix réponses allant de l’incompréhension à la contradiction. Le dernier mot revient donc au concepteur lui-même.

Ne pensez-vous pas que les missions diplomatiques pourraient aussi jouer ce rôle de médiateur ?

Logiquement oui, mais malheureusement non. Vous n’avez qu’à faire un tour dans la majorité de nos missions diplomatiques pour constater que la plus grande promotion tourne autour du portrait du président de la République. C’est certes un emblème mais pas une solution économique. De façon presque générale, nous perdons nos originalités et nos ressources par manque de promotion. C’est ainsi que je m’atèle à actualiser certaines règles.

N’existe il pas d’organisation mondiale de régulation et de promotion du commerce et de la formation?

L’Organisation Mondiale du Commerce est certes l’unique plateforme multilatérale de négociation des règles facilitant les échanges commerciaux mais ne prône pas le libre-échange intégral. Chaque pays fait ses efforts personnels. Nous rencontrons aisément des missions commerciales, culturelles et agricoles dans les ambassades américaines, françaises ou canadiennes mais rarement des attachés agricoles dans les missions diplomatiques africaines. Pourtant, l’avenir de ces pays repose généralement sur l’agriculture. Autre exemple, certains pays tels que la Guinée Équatoriale, l’Algérie ou le Liberia qui ne sont pas membres de l’OMC ont néanmoins des activités commerciales. Quant à la formation, chaque pays reste autonome dans l’application intégrale ou partielle en raison de ses besoins et de ses objectifs. Elle est essentielle et chaque pays doit investir dans les compétences de son capital humain afin d’accroître sa compétitivité à l’internationale dans le dessein de susciter et encourager l’innovation, en s’adaptant aux normes internationales.

Avez-vous des solutions ou des suggestions en ce sens?

Aucune réponse intelligente ne peut être donnée à cette question plutôt des constats et suggestions qui, bien décortiqués pourraient aboutir à des solutions. Je pense que si chaque président africain portait en lui une ceinture écologiquement verte en matière de responsabilité humaine et d’attachement à son peuple, le développement du continent serait certain.

Il faut pouvoir s’inspirer des vrais exemples économiques des pays développés pour faire monter les exportations du continent qui traînent encore aux alentours de 12% contre environ 50% pour l’Asie. Il faut aussi une implication sans retenue des gouvernements et surtout une attention particulière de leur part aux œuvres des citoyens. Éviter le cumul de postes. Le continent gagne en influence par la nomination de ses ressortissants au sein de toutes les grandes institutions mondiales. Aujourd’hui, on ne peut plus parler de pénurie d’intellectuels ou de manque de ressources humaines compétentes en Afrique!

Au-delà des tentations confucéennes et égoïstes, l’Afrique a tous les moyens et atouts pour se sortir du trou noir. Nous ne réussirons ce pari que lorsque nous aurons des souverains soucieux du bonheur de leurs peuples.

Existe-t-il des pays ou des leaders politiques Africains qui vous impressionnent comme modèle en ce sens?

Disons que tous les leaders Africains se réclament de cette approche constante de stabilité et de stratégie économique et sociale. Mais personnellement, je conduis mes propres réflexions. Après une expertise non voilée, je vote pour la vision de Paul Kagamé, le président Rwandais qui pousse à une intégration économique et à un développement sans tambours ni trompettes.

Comme mot de fin, quel message pourriez-vous adresser aux leaders africains, aux citoyens et à la jeunesse africaine?

Du bas de mon piédestal je souhaite simplement que l’ensemble des leaders et de la classe politique africaine comprenne que chaque citoyen qui a donné sa voix à une élection est un potentiel président. La politique ne devrait plus consister à gérer une société mais à identifier les fondements d’une collectivité puis à les refonder tout en rappelant l’importance de l’histoire de la culture, de l’écoute, des mœurs et du développement.

Aux citoyens, malgré les accords et désaccords, je pense qu’il faut faire de la place pour une discussion quand il s’agit de développement car pour qu’une société réussisse de grands projets, elle doit d’abord se reconnaitre un destin commun et nouer des liens intimes.

À la jeunesse, je dis humblement qu’elle est à un virage décisif de son histoire. Il est temps de rompre avec la passivité et l’inactivité pour se dessiner un avenir radieux. Le seul raccourci qui mène au vrai succès est de travailler et non de tricher.

Entretien réalisé par
Sylvie GAUTHIER

Arsène Flavien BATIONO